Loi « industrie verte »

Extrait de la Newsletter Juridique n°2 – Novembre 2023

 

La loi dite « Industrie verte » a été promulguée et publiée le 24 octobre dernier.

Elle comporte 3 volets :

  • Faciliter et accélérer les implantations industrielles
  • Le verdissement de la commande publique
  • Le financement de l’industrie verte.

 

C’est dans le 1er thème que nous retrouvons plusieurs dispositions intéressant directement la planification et l’aménagement du territoire et notamment les mesures ci-après.

 

1. Les SRADDET doivent désormais fixer des orientations en matière de développement logistique et industriel, notamment quant aux localisations préférentielles. Sur cette thématique, les conseils départementaux seront associés à l’élaboration du document. Concernant le calendrier pour cette prise en compte, il s’inscrit dans l’évolution du document faisant suite à la loi Climat & Résilience.

 

2. Les EPF et EPFL voient leur compétence précisée. Il est désormais prévu que les stratégies foncières des EPF et EPFL en matière de lutte contre l’étalement urbain et de limitation de l’artificialisation des sols peuvent comprendre des actions ou des opérations de renaturation. La loi ajoute également que la contribution de ces établissements au développement, au maintien ou à la transformation des activités économiques peut se traduire par la facilitation des projets d’implantation industrielle.

 

3. Le régime de délivrance des autorisations environnementale est revu. Alors qu’un rapport de 2022 démontre que la France connait un délai réel bien plus long que le délai théorique en matière d’implantation industrielle (17 mois au lieu de 9), la loi Industrie verte a cherché à accélérer la procédure d’autorisation environnementale.

Ainsi, au lieu d’une instruction en 3 phases (examen, enquête publique/participation du publique par voie électronique, décision), l’examen de la demande et la consultation du publique seront désormais simultanée.

 

En application de la loi Industrie Verte, les demandes d’autorisation environnementale seront traitées ainsi :

  • A la réception de la demande, l’autorité compétente (Préfet) demande la désignation d’un commissaire enquêteur par le président du Tribunal administratif
  • Une fois le dossier complet et le commissaire enquêteur désigné, la consultation du public est organisée.
  • La durée de la consultation est de 3 mois. Le dossier est mis à disposition du public par voie électronique.
  • Dans les 15 premiers jours puis dans les 15 derniers jours, une réunion publique est obligatoirement organisée par le commissaire enquêteur. Le pétitionnaire participe à ces réunions publiques et les réponses qu’il apporte sont réputées faire partie de son dossier de demande.
  • Après la clôture de l’enquête, le commissaire enquêteur dispose de 3 semaines pour rendre son rapport, soit une de moins qu’actuellement.

 

L’objectif du législateur, par cette nouvelle version de la procédure de consultation du public dans le cadre de la demande d’autorisation d’environnementale est de réduire le délai d’instruction d’au moins trois mois.

Pour accentuer l’accélération, la loi ajoute que si l’autorisation d’urbanisme relative au projet donnant lieu à autorisation environnementale implique elle aussi une consultation du publique, alors la procédure mise en œuvre dans le cadre de l’instruction de l’autorisation environnementale suffit.

L’entrée en vigueur de cette nouvelle procédure sera fixée par décret, et interviendra au plus tard en octobre 2024.

 

4. Afin d’encourager le recyclage des friches, la loi Industrie Verte apporte des avancées à la procédure du « tiers demandeur ».

Pour rappel, lors de la cessation d’activité d’une ICPE, le dernier exploitant doit la mettre en sécurité avant de réhabiliter le site, selon un usage déterminé conjointement avec la commune ou l’EPCI et le propriétaire du terrain s’il ce n’est pas l’exploitant.

La loi ALUR a mis en place la procédure du « tiers demandeur », autorisant tout opérateur intéressé par le site à se substituer à l’exploitant (avec son accord) pour procéder à la réhabilitation du site.

Désormais, cette procédure peut être anticipée : l’opérateur qui le souhaite pourra demander l’autorisation de se substituer au dernier exploitant (avec son accord) en cas de cessation d’activité future annoncée. Préalablement à la réhabilitation, il pourra désormais effectuer aussi la mise en sécurité du site.

La loi fixe également la procédure à suivre pour fixer l’usage futur du site, en cas de désaccord entre les parties, ainsi que pour les opérateurs souhaitant retenir un usage différent de celui retenu.

Pour encourager le processus de réhabilitation, alors que le Préfet peut actuellement mettre définitivement à l’arrêt une installation qui n’a pas été exploitée pendant 3 ans, de façon continue, il est désormais prévu que cette possibilité pourra s’appliquer à une partie d’installation seulement, qui ici encore n’aura pas été exploitée pendant 3 ans.

Par ailleurs, la loi prévoit un rapport dans les 6 mois sur la requalification des friches de plus de 10 ans.

Par ailleurs, pour favoriser toujours plus le recyclage des friches, les SCOT doivent désormais les intégrer. Dans le Projet d’aménagement stratégique, cela se traduit par la prise en compte des friches lorsque la lutte contre l’artificialisation des sols est étudiée. Dans le Document d’orientation et d’objectifs, document prescriptif des SCoT, pour la partie dédiée aux activités économiques, agricoles, commerciales et logistiques, il doit se prononcer sur les conditions d’implantation des constructions commerciales, logistiques, etc. en fonction surface et impact sur l’artificialisation des sols. Le texte prévoyait jusque là une utilisation prioritaire des surfaces vacantes et l’optimisation des surfaces de stationnement. Il est ajouté « surfaces vacantes et des friches et l’optimisation des surfaces consacrées au stationnement ».

Enfin, un rapport est attendu d’ici 6 mois, portant sur la requalification des friches de plus de 10 ans.

 

5. La loi crée les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation.

Depuis 2016 et la loi pour la reconquête de la biodiversité, les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité peuvent s’effectuer de deux manières :

  • Conclusion d’un contrat avec un opérateur de compensation, qui réalisera ces mesures
  • Acquisition d’unités de compensation dans le cadre d’un site naturel de compensation

 

Cette 2è option n’a connu qu’un succès très limité puisqu’un seul site de compensation a été agréé a ce jour. Face à ce constat, la loi Industrie verte revoit le dispositif et remplace ces sites de compensations par ces sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation.

Sur ces sites, qui doivent être agréés, il sera ainsi possible de mettre en place des opérations de restauration ou de développement d’éléments de biodiversité. Le gain écologique des opérations est ensuite identifié par des unités de compensation qui peuvent être vendues. D’ici 2 ans, une plateforme en ligne sera mise en place par l’Etat pour le référencement de ces sites. Enfin, les SCoT identifieront les zones propices à l’accueil de ces sites.

Si la loi tourne ces sites vers la compensation des atteintes à la biodiversité, le législateur a bien inscrit le terme de « renaturation », ce qui ouvrira la porte également à la compensation dans le cadre du ZAN.

 

6. Le champ d’application de la déclaration de projet, qui permet de mettre en compatibilité le document d’urbanisme par rapport au projet, est étendu.

Cette procédure pourra désormais être appliquée aux projets d’implantation d’une installation industrielle de fabrication, d’assemblage ou de recyclage des produits ou des équipements, ainsi qu’aux implantation d’une installation de R&D ou d’expérimentation de nouveaux produits, sous réserve que tout cela s’inscrive dans une chaîne de valeur participant au développement durable.

En outre, lorsqu’elle est prononcée par l’Etat, la déclaration de projet relative à une installation industrielle peut lui reconnaître le caractère de projet répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur, nécessaire à la délivrance d’une « dérogation espèce protégées ».

 

7. La qualification de projet d’intérêt national majeur, pour les projets industriels dont l’objet et l’envergure, notamment en termes d’investissement et d’emploi, ont une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale.

Cette qualification est accordée par décret, après signalement des projets par les régions au ministre de l’Industrie (après avis des communes et EPCI concernées). Cette qualification ouvre la porte à une mise en compatibilité, par décret, des SCOT et PLU, après examen conjoint, procédure de participation du public par voie électronique et avis de la collectivité compétente pour approuver le SCOT ou le PLU.

Le décret reconnaissant la qualification de projet d’intérêt national majeur peut également reconnaitre le caractère de projet répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur, autorisant la « dérogation espèce protégée ».

 

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